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🎼 Tales of Graces f

Initialement paru en 2009 sur Wii, dans une version si mal foutue qu’elle força l’éditeur Ă  rappeler les copies, puis sortir une version amĂ©liorĂ©e sur PS3, voilĂ  que Tales of Graces f1 est ressorti en Janvier 2025 dans une Ă©dition Remastered. J’aurais pu y jouer, avant de me rappeler qu’en 2013, aprĂšs que mon beau-frĂšre m’ait offert ma PS3 actuelle2, j’avais achetĂ© un pack sur le Playstation Store qui compilait deux jeux de la sĂ©rie Tales of


Des histoires d’histoires

J’ai une histoire compliquĂ©e3 avec la sĂ©rie Tales of. Lorsque j’ai dĂ©couvert le monde du RPG Japonais au dĂ©but des annĂ©es 2000, la sĂ©rie comptait dĂ©jĂ  trois Ă©pisodes, dont deux sortis en AmĂ©rique du Nord sur la premiĂšre Playstation et disponibles en anglais, mais le premier, sorti exclusivement au Japon sur la Super Nintendo Ă©tait celui dont tout le monde parlait, et que tout le monde attendait! C’est en fĂ©vrier 2001, dans une pĂ©riode considĂ©rĂ©e comme l’ñge d’or de la fan-translation que le groupe amĂ©ricain DeJap4 allait sortir le premier patch complet permettant de jouer Ă  Tales of Phantasia en anglais, dans son intĂ©gralitĂ©.

J’y ai de suite jouĂ©, et j’ai beaucoup apprĂ©ciĂ© l’histoire, mais je me suis arrĂȘtĂ© Ă  mi-chemin car j’ai perdu mes fichiers de sauvegarde5, et je n’y suis jamais retournĂ©, voyant toujours la franchise Ă©voluer de loin, sans vraiment m’y remettre, et Ă  chaque fois essayant des Ă©pisodes divers sans jamais trop m’y engager, comme une heure sur Tales of Symphonia, cinq heures sur Tales of the Abyss et une vingtaine sur Tales of Innocence sans jamais vraiment savoir oĂč je vais, malgrĂ© mon envie de m’y mettre.

Il faut dire que les Tales sont des jeux vraiment uniques dans leur prĂ©sentation. Le premier dĂ©jĂ , surprenait par son systĂšme de combat: ceux-ci s’effectuaient en temps rĂ©el, sur un plan linĂ©aire en deux dimensions oĂč l’on pouvait contrĂŽler le personnage principal, ou donner des ordres aux trois autres membres de l’équipe, afin de s’approcher ou s’éloigner des ennemis, les attaquer,
 Si ma seule stratĂ©gie relevait de “j’attaque le premier ennemi visible, puis le second, et ainsi de suite”, le systĂšme avait en rĂ©alitĂ© une profondeur qui m’échappait et il n’a pas cessĂ© d’ĂȘtre approfondi: le jeu n’était ni un “RPG tour par tour”, ni un “action-RPG”6, mais un RPG dont le systĂšme de combat relevait effectivement du genre du fighting game, les joueurs les plus expĂ©rimentĂ©s pouvant enchaĂźner les divers coups dans des combos, que le jeu affichera fiĂšrement pour fĂ©liciter le joueur qui prend le soin de le maĂźtriser. Malheureusement, je n’ai jamais Ă©tĂ© bon en jeux de combat


Le second systĂšme assez particulier des Tales of, ce sont les skits, traduits en français par “saynĂštes”. Ces petites scĂšnes courtes se trouvent hors de la narration classique du jeu, sont optionnelles, et parfois difficiles Ă  trouver, obligeant le joueur exhaustif Ă  fouiller partout s’il veut les trouver, et ĂȘtre gratifiĂ© de quelques minutes oĂč seul un portrait animĂ© et de la voix permettront d’en savoir un peu plus sur le groupe de personnages. Étrangement, ce procĂ©dĂ© me paraĂźt trĂšs “cheap” dans son approche, et je me dis que mĂȘme des sprites 2D de l’époque de la Super Nintendo, ou celles des premiers Trails ont plus de vie. Mais apparemment, ça fonctionne sur le reste de la population et la sĂ©rie se porte assez bien.

Enfin, le troisiĂšme point fort des Tales of rĂ©side dans le design des personnages: ceux de Phantasia Ă©taient assurĂ©s par Kosuke Fujishima, et clairement Mint a un peu de Belldandy dans son design. Pour cet Ă©pisode, c’est l’autre designer historique de la sĂ©rie, Mutsumi Inomata qui s’en charge, connue dans le monde de l’animation pour son trait fin et poĂ©tique (je vous recommande notamment Yohko Leda, Windaria et Le continent du vent), elle peint ici une Ă©quipe de hĂ©ros trĂšs plaisante Ă  suivre.

RPG pour connaßtre la force de protéger

Pour appuyer encore plus cette idĂ©e que les Tales of sont Ă  part, la sĂ©rie a dĂ©veloppĂ© le concept du genre caractĂ©ristique, une sorte de sur-genre pour indiquer ce que ce jeu a de plus que tout le reste de la production, en termes de thĂšme narratif. J’aime beaucoup ce concept, et aussi la force que certains de ces genres peuvent exprimer. Ici, le genre est â€œćźˆă‚‹ćŒ·ă•ă‚’çŸ„ă‚‹ïŒČRPG of Finding the Will to Protect”.

DĂšs l’ouverture, Asbel et son frĂšre Richard dĂ©couvrent Sophie, une Ă©trange fille amnĂ©sique (qui serait donc “soit une assassin, soit membre d’une troupe de cirque”). Avec Richard et ChĂ©ria, d’autres amis, ils se lient dans un pacte d’amitiĂ© Ă©ternel, qui sera vite mis Ă  l’épreuve. Plus tard, Malik et Pascal se joindront Ă  cette Ă©quipe dans une quĂȘte autour du monde contre une menace extra-planĂ©taire.

J’aime beaucoup cette histoire, malgrĂ© tous les aspects clichĂ©s qu’elle comporte (des persos amnĂ©siques dans un RPG, vraiment?), et mĂȘme si les skits m’ont vite ennuyĂ©, les parties “obligatoires” du scĂ©nario tiennent la route et prenantes. Suivre Asbel qui maudit l’impuissance de son enfance et le pousse Ă  devenir chevalier et devient le protecteur de Sophie se fait sans temps mort, et la rĂ©solution est trĂšs satisfaisante.

Malheureusement, le jeu est vite gĂąchĂ© par son f. À la maniĂšre du remake de Dragon Quest IV sur Nintendo DS, qui y ajoutait un chapitre supplĂ©mentaire oĂč le mĂ©chant du jeu rejoignait l’équipe pour aller tabasser un mĂ©chant encore plus mĂ©chant, la version f de Tales of Graces inclut elle aussi un chapitre supplĂ©mentaire intitulĂ© “LignĂ©e & HĂ©ritage”. Mais ici, lĂ  oĂč DQ IV incluait ce nouveau chapitre directement dans sa trame, donnant au joueur une Ă©volution linĂ©aire, le chapitre supplĂ©mentaire de Tales of Graces est sĂ©parĂ© du jeu principal, Ă©tant accessible par le menu principal, lorsque l’on charge une sauvegarde de fin de jeu.

La situation devient encore plus ridicule une fois combinĂ©e Ă  l’existence du contenu post-game original du jeu: celui-ci est accessible aprĂšs avoir battu le dernier boss (du jeu original), mais pas durant le contenu du chapitre f. Et une fois le chapitre f terminĂ©, le joueur peut revenir au post-game7, pour terminer certains boss avec les avantages glanĂ©s dans la partie f (dont une nouvelle option de combat!). Oui, c’est trĂšs complexe, et il a fallu que je le fasse moi-mĂȘme pour comprendre comment ça fonctionnait.

Au-delĂ  de la complexitĂ© du processus, je pense que c’est surtout la prĂ©sentation qui m’a fait descendre du wagon en cours de route: aprĂšs avoir affrontĂ© un “dernier boss”, puis fait dĂ©filer le gĂ©nĂ©rique de fin, et avoir Ă©tĂ© tĂ©moin d’une vidĂ©o d’épilogue “dix ans plus tard”, trĂšs dĂ©finitive. À partir de lĂ , le chapitre “six mois plus tard” n’a plus aucun impact narratif, et le terminer pour re-avoir un second “dernier boss”, puis un second gĂ©nĂ©rique de fin, et Ă  nouveau la mĂȘme vidĂ©o d’épilogue
a vraiment enfoncĂ© mon impression de “trop” de ce scĂ©nario


Des chiffres et des systĂšmes

Dans un vieux magazine de jeux vidĂ©o, j’avais vu passer une review d’un RPG japonais, et le testeur disait un truc du genre “ça c’est pour les VRAIS CAMÉS DU RPG”. Il y a un peu de ça dans les Tales of, et je me suis retrouvĂ© Ă  prendre du plaisir sur les quĂȘtes annexes, mĂȘme si leur prĂ©sentation Ă©tait vraiment l’apogĂ©e des quĂȘtes Fed-Ex, certaines nĂ©cessitant de longues sĂ©quences de farm
que j’ai apprĂ©ciĂ©es!

MĂȘme si le systĂšme de combat a des mĂ©caniques assez Ă©tranges, il se prend vite en main pour une utilisation basique: le joueur contrĂŽle l’un des quatre personnages8, et a des points de PE pouvant ĂȘtre utilisĂ©s pour effectuer des actions: attaquer, esquiver, lancer une technique,
 Ces points peuvent ĂȘtre rĂ©cupĂ©rĂ©s en faisant des coups critiques, des esquives bien timĂ©es, ou en vous mettant en garde contre les attaques ennemies, Ă©vitant ainsi au joueur de matraquer le bouton d’attaque. MĂȘme si je trouve que les PE sont vraiment trop bas pour accumuler de jolis combos, c’est apparemment une question de technique (qui me manque!), et des joueurs plus expĂ©rimentĂ©s sauront timer leur refill de PE avec les attaques des autres personnages afin d’enchaĂźner des combos Ă  trois chiffres.

Ainsi, mĂȘme si je ne suis pas arrivĂ© Ă  totalement maĂźtriser le systĂšme de combat, j’ai malgrĂ© tout rĂ©ussi Ă  l’apprĂ©cier assez pour passer un bon moment dans les donjons Ă  chercher des objets permettant de faire Ă©voluer mon Ă©quipement, un autre systĂšme trĂšs complexe, mais qui lui aussi permet d’ĂȘtre utilisĂ© et apprĂ©ciĂ© de maniĂšre “amatrice”.

Clairement, le jeu souffre encore des affres de son dĂ©veloppement compliquĂ© (par exemple, il n’y a mĂȘme pas de carte Ă  l’écran pour se retrouver dans les environnements, et le systĂšme de dĂ©placement sur la carte du monde en fin de jeu est mauvais), mais il reste solide dans ses systĂšmes, et la traduction française est trĂšs plaisante Ă  lire (pour le texte que je n’ai pas sautĂ© en tout cas). Si vous avez une soixantaine d’heures Ă  lui donner, alors vous pouvez vous aussi vous plonger dans l’aventure et protĂ©ger la mystĂ©rieuse Sophie!


  1. La version Wii du jeu est Tales of Graces. La version amĂ©liorĂ©e sortie en 2010 sur PS3 gagnera le suffixe f pour future. La version sortie rĂ©cemment sur tous les supports est adaptĂ©e de cette derniĂšre. ↩︎

  2. Et dĂ©cidĂ©ment, je l’en remercierais jamais assez vu la quantitĂ© de plaisir que j’ai pris sur cette console! ↩︎

  3. Je pensais avoir utilisĂ© cette phrase pour toutes les sĂ©ries dont je parle, mais apparemment c’est la premiĂšre fois que je m’en sers ici! ↩︎

  4. Et ils atteindront encore plus de renommĂ©e en 2003 lorsqu’ils sortiront un patch pour Star Ocean, outrepassant le chiffrement d’une puce de la cartouche. ↩︎

  5. Ce qui explique aussi que je n’aie jamais fini Final Fantasy IV ou VI, ou mĂȘme Sailor Moon: Another Story
 ↩︎

  6. Le genre popularisĂ© par la saga Zelda. ↩︎

  7. En l’occurrence, le post-game est un “donjon” de dix Ă©tages, gĂ©nĂ©rĂ©s alĂ©atoirement, sans la moindre direction artistique permettant de diffĂ©rencier les Ă©tages, et Ă  l’écriture cartoonesque totalement dĂ©tachĂ©e du reste du jeu
 ↩︎

  8. Je soupçonne que l’on puisse manuellement contrĂŽler plusieurs personnages avec plusieurs manettes, mais je n’ai pas pris le temps de vĂ©rifier, et l’IA faisait bien son boulot. ↩︎

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