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📚 Les Assassins de la 5e B

Dans un collĂšge, la petite fille d’une enseignante est retrouvĂ©e morte noyĂ©e au fond d’une piscine. Un accident, conclut la police. Ou bien cela cacherait-il un assassinat?

I - Crime

DĂšs le premier chapitre, la rĂ©ponse est donnĂ©e: c’est un assassinat. On connaĂźt mĂȘme les deux coupables, leurs motivations, et leur chĂątiment. Franchement, Ă  voir la fin du chapitre arriver, je commençais Ă  me demander si je n’étais pas encore tombĂ© sur un recueil d’histoires courtes, mais non: pas de mystĂšre sur le meurtre, ou le meurtrier, on est ici dans un pur thriller basĂ© sur les circonstances et les consĂ©quences autour du crime, et le seul mystĂšre qui tiendra le lecteur en haleine sera la maniĂšre dont ce crime pourra impacter les protagonistes


II - Répétition

A la maniĂšre de ce qui sera son prochain roman, Kanae Minato traite Ă  nouveau d’un mĂȘme fait au travers du dialogue Ă  sens unique de plusieurs protagonistes qui y sont liĂ©s. Sur moi, ce genre de narration peut autant fonctionner que se casser la gueule car chaque partie doit Ă  la fois savoir susciter un intĂ©rĂȘt Ă©gal, avoir ses propres particularitĂ©s, et trouver une conclusion satisfaisante dans un dĂ©nouement qui les rĂ©unira. Par exemple, le jeu vidĂ©o Dragon Quest IV : L’ÉpopĂ©e des Ă©lus y arrive parfaitement1, et Expiations s’en tirait trĂšs bien aussi.

Ici, c’est malheureusement bien plus ambigu. Beaucoup de personnages vont revenir sur des Ă©vĂšnements dĂ©jĂ  vus et revus sans pouvoir y apporter la moindre lecture alternative, et j’avoue avoir volontiers sautĂ© des phrases entiĂšres, tant rien ne m’intĂ©ressait dans certaines relectures de la situation


III - L’inexorable ambivalence des sentiments

En revanche, lĂ  oĂč le livre brille, c’est la multiplicitĂ© et la complexitĂ© des personnages, et leurs sentiments. À partir du troisiĂšme personnage, on arrive Ă  une lecture de la situation totalement ubuesque, et aux antipodes de la rĂ©alitĂ© dont nous avons Ă©tĂ© tĂ©moins depuis deux chapitres, et pourtant, malgrĂ© la stupiditĂ© du personnage, et la colĂšre que l’on peut avoir envers celui-ci, il reste une bribe d’empathie Ă©trange envers ce personnage tragique.

MĂȘme d’autres personnages qui ont l’air simple s’avĂšrent vite trĂšs complexes, et parfois mĂȘme dotĂ©s de sentiments qu’eux-mĂȘmes ne comprennent pas avant qu’un autre personnage ne les leur mette en pleine figure.

IV - Le problùme de l’Adaptation.

Le titre Japonais, ć‘Šă“ăç™œăŻă2, signifie en Français Confessions, et je trouve le choix de traduction vraiment peu judicieux tant il induit en erreur sur le propos du livre. La classe en elle-mĂȘme est bien le point central de l’histoire, et pourtant elle paraĂźt presque absente du rĂ©cit et seuls quelques-uns des Ă©lĂšves ont le temps d’ĂȘtre nommĂ©s, et encore moins sont vraiment creusĂ©s


V - Le lecteur

L’écriture et claire et bien rythmĂ©e, et si l’on omet les soucis de rĂ©pĂ©tition mentionnĂ©s plus tĂŽt, la narration garde cet air de “Vous connaissez ces Ă©lĂ©ments, je ne vais pas les Ă©laborer”, laissant planer un mystĂšre qui sera Ă©laborĂ© au chapitre suivant, ou restera simplement en suspens.

Le livre met aussi en exergue des sujets trÚs variés, incluant le marronnier du harcÚlement en milieu scolaire, ou les parents aveugles quand à la personnalité de leurs enfants, mais aussi des plus rares dans la littérature Japonais, comme le VIH


VI - La finalité

Lorsque le dernier personnage prend la parole, la surprise est de mise, autant sur son identitĂ© que sur son rĂŽle dans l’histoire. Franchement, si un chapitre entier de ce livre est vraiment de trop, le chapitre final Ă  lui seul arrive Ă  parfaire totalement cette histoire, tenant Ă  la fois de la cerise sur le gĂąteau, de la piĂšce de puzzle qui se complĂšte, et du bouquet final d’un feu d’artifice.


  1. Les quatre premiers chapitres prĂ©sentent tous un â€œĂ©lu” (parfois accompagnĂ© de son groupe), et le cinquiĂšme les rĂ©unit autour du “hĂ©ros” de la lĂ©gende. Le premier chapitre concerne un chevalier solitaire qui part Ă  l’aventure, tandis que le troisiĂšme concerne un marchand ambulant dont le but sera
d’amasser le plus d’argent possible. ↩︎

  2. À prononcer “ko-kou-ha-kou”. ↩︎

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